Distribution potentielle des essences

Description générale

La distribution potentielle de 33 essences communes en France a été déterminée afin de caractériser le plus précisément possible les zones qui leurs sont écologiquement favorables. Ces cartes issues de modèles statistiques fournissent des probabilités de présence (entre 0 et 1) pour un climat caractérisant la période1961-1990, à l’échelle du territoire Français, et par pixels d’1 km de côté. Elles ont été produites à partir d’un jeu de variables écologiques caractérisant le climat, l’alimentation en eau, la nutrition des sols et l’excès d’eau dans le sol, selon des méthodes de modélisation classiquement utilisées dans la communauté scientifique (Guisan et al, 2000).

Les modèles ont été élaborés à l’aide de 42094 relevés phytoécologiques géoréférencés disponibles à partir de la base de données de l’inventaire forestier de l’IGN, collectés entre 2005 et 2011, distants d’au moins 1 km, et couvrant un large gradient écologique. Un jeu indépendant de 54674 relevés a été utilisé pour la validation. La présence ou l’absence de chaque essence est notée pour chaque placette. Six variables potentiellement explicatives ont été utilisées après sélection: les températures moyennes annuelles, le déficit en eau du sol, le pH et le C/N des sols, ainsi que les engorgements temporaires et permanent.

Les modèles ont été réalisés par régression logistique, en sélectionnant pour chaque espèce les variables les plus pertinentes pour expliquer leur distribution. Les températures et le pH sont ressortis comme les plus performants, devant les variables hydriques et le C/N. Des cartes au pas kilométrique ont ensuite été réalisées, et une validation des prédictions a été effectuée sur le jeu de données indépendantes prévue à cet effet (Piedallu et al, 2016).

Principales limites d’utilisation

Les cartes réalisées identifient les zones dont les conditions écologiques étaient favorables aux espèces étudiées pour la période 1961-1990, au regard des variables écologiques utilisées dans les modèles. Les performances des cartes de distribution ont été évaluées (Piedallu et al, 2016) : le taux moyen de bonnes prédictions est de 78%. Les essences les mieux prédites sont le pin d’alep, le saule blanc et le chêne vert (taux de bonnes prédictions entre 91 et 95%), les moins bien prédites sont le saule marsault, le merisier, et le bouleau pubescent (taux de bonnes prédictions entre 62 et 66%). Ces résultats sont en adéquation avec ceux d’autres études de ce type. Une espèce plantée dans des conditions écologiques inadéquates ou une absence de l’espèce alors que les conditions écologiques sont appropriées (dans une plantation par exemple) compte pour une mauvaise prédiction. Les réponses observées sont cohérentes avec les connaissances sur le comportement des essences étudiées. Cependant, les cartes réalisées sont issues de modèles n’intégrant qu’un nombre limité de variables, et dont la qualité peut être affectée i) par des erreurs dans le jeu de données (et notamment de détermination des essences), ii) par des imprécisions dans la caractérisation des facteurs écologiques utilisés, iii) par des confusions engendrées par le processus de modélisation, iv) par la résolution spatiale des cartes résultantes qui ne permettent pas de prendre en compte des variations locales. Elles se basent sur la distribution observée des espèces, qui peut être réduite du fait de la compétition interspécifique ou de l’absence de dissémination de l’espèce dans des zones qui lui sont écologiquement favorables. Elles n’intègrent pas non plus la diversité génétique au sein de l’espèce.

Du fait de ces limites, la cartographie des zones favorables à une espèce peut être localement fausse. D’autre part, les informations hors forêt sont extrapolées à partir des relevés réalisés en milieu forestier, et sont susceptibles d’être erronées. Une bonne connaissance des méthodes et des limites d’utilisation est nécessaire pour une utilisation opérationnelle.

 

Les références bibliographiques

Piedallu, C., Gegout, J.C., Lebourgeois, F. & Seynave, I., 2016. Soil aeration, water deficit, nitrogen availability, acidity and temperature all contribute to shaping tree species distribution in temperate forests.. Journal of Vegetation Science, 27, 2, 387-399

Piedallu C., Perez V., Gégout JC., Lebourgeois F., Bertrand, R., 2009. Impact potentiel du changement climatique sur la distribution de l’Epicéa, du Sapin, du Hêtre et du Chêne sessile en France. Revue Forestière Française, Vol. 61, N° 6, p. 567-593

Guisan, A., Zimmermann, N.E., 2000. Predictive habitat distribution models in ecology. Ecological Modelling 135, 147-186.